01 juin 2012

Croissance de 4,8% : le gouvernement triche et trompe par omission ?

Jeudi 31 mai 2012, à quelques jours de l’annonce de Standard & Poor's reléguant la Tunisie à la note BB dans la catégorie spéculative, l’Institut National de la Statistique (INS) nous informe par un "communiqué laconique" que le produit intérieur brut (PIB) de la Tunisie a augmenté de 1,2% aux prix courants durant le premier trimestre de l'année 2012, par rapport aux chiffres du 4e trimestre de l'année 2011.
Tous les secteurs ont contribué à cette croissance par l’augmentation de la valeur ajoutée par rapport au dernier trimestre 2011: 2,9 %, la part de l’agriculture, 4,6 % pour les industries manufacturières,  20,4 % pour l’activité minière et 6,7 % pour les services marchands. A croire l’INS, le pays sort  de sa récession et passe au vert avec un taux de croissance en "Glissement annuel" de 4.8%. Tout baigne pour notre pays !
L’INS est une institution irréprochable, même si son directeur a été  nommé par l’actuel gouvernement suite au limogeage abusif de l’ancien directeur général. Seulement, la présentation des chiffres et l’absence d’une analyse objective laissent croire qu’il y a manipulation et communication tendancieuse.
Le plus ridicule dans cette histoire : après l'annonce de l'INS de ses derniers chiffres sur la croissance, Jebali crie victoire et exige de la part de S&Poor's la révision de la notation de classement de la dette tunisienne: « les données ne sont plus les mêmes et l'agence  doit revoir son appréciation en tenant compte d'un taux de croissance de 4,8% au premier trimestre 2012 ». Ce gouvernement est invité à bien saisir la notion de notation souveraine. Le facteur croissance intervient peu ! La  notation de la dette est l'appréciation du risque de solvabilité financière d’un pays. S&Poor’s a jugé la gestion calamiteuse du pouvoir en matière de sécurité, de chômage et de stabilité politique. Sur ces trois dossiers, la Troïka a échoué royalement.
Les spécialistes ne manqueront pas de dire  que le gouvernement de la première transition  a fait mieux pendant les deuxième et troisième trimestres 2011, avec respectivement 2.3% et 1.4%. En réalité, ce trimestre glorifié par le pouvoir est le pire trimestre avec -4,1% par rapport au quatrième trimestre de 2010 et -3,7% en glissement annuel, c'est-à-dire par rapport au premier trimestre de 2010. Voilà comment le pouvoir triche et trompe le peuple par omission !
Si notre économie est redressée, pourquoi ce gouvernement refuse-t-il de répartir cette richesse sur la masse laborieuse ? Pourquoi le pouvoir cherche-t-il à imposer une année blanche pour les augmentations de salaire, sachant que l’inflation est de 5,7% ? Normalement etcompte tenu  des chiffres de la croissance annuelle présumée et de l’inflation effective, l’UGTT doit revendiquer une augmentation d’au moins 8%.
Pourquoi le gouvernement oblitère-t-il l’inflation qui a atteint  5,7%. Tous les secteurs ont été touchés par cette gangrène : les produits Tabac ont progressé de  9,8%, l’alimentaire de (8,2%), l’habillement (7,7%), la restauration et hôtellerie (7,6%), l’ameublement et l’équipement ménager (6,0%), les autres biens et services (4,4%), le logement, eau, électricité et gaz (3,5%),  le transport (1,8%) et enfin  la santé (1,4%).
Cet état de dégradation de l’économie et de la sécurité met le pays à deux doigts de la faillite et de l’implosion sociale. Le peuple est fatigué par tant de mensonges, d’amateurisme et d’incompétence. Ces épisodes d'absence de pouvoir et d'incapacité à redresser l’économie et l’autorité de l’Etat nous rappellent étrangement  les derniers jours du gouvernement Mzali!
Mustpha STAMBOULI